dimanche 7 avril 2013

Etre une femme

Juste j'aurais aimée être prévenue



(Cette semaine, une jeune étudiante de l'université Paris-Dauphine m'a demandé de répondre à un sondage sur les femmes, la maternité et la carrière (vous pouvez vous-aussi y répondre ici, elle sera ravie) et vendredi je suis tombée sur l'interview par David Abiker de Claire Léost l'auteur(e?) d'un livre finement intitulé "le rêve brisé des Working Girls". Claire est maman, elle est diplômée d'HEC et elle découvre que malgré tout ce que l'on raconte, les femmes ont toujours plus de mal à se frayer un chemin dans les organigrammes que les hommes.
Mazette
J'ai répondu au questionnaire de Marie, lu l'interview de David Abiker.
Et depuis tout cela me tourne dans la tête. D'autant plus que je n'ai pas pu poster de commentaire sur le blog de David Abiker. D'où ce post.
Fin de l'introduction de post la plus longue de l'univers, mais destinée à accueillir comme il se doit le lecteur de passage, voire même les trois personnalités citées plus haut.)


Cher David, Chère Marie, Chère Claire,

Voilà, voilà, je me demande si on n'est pas en train de tout mélanger : amour, enfants, carrière, éducation, contraception, leadership et gros brouzouf, relation de couple équilibrée et business plan de sa vie.

Je ne sous estime pas la frustration de certaines femmes qui arrivent sur le marché du travail et se rendent compte que malgré leurs excellents credentials et leurs tiroirs remplis de 20/20, on ne les attend pas avec une gerbe de fleurs et un plan de carrière en béton armé.
Immense déception de se rendre compte que parfois oui une grossesse freine, que les habitudes ont la vie dure, que la société aime que les femmes placent leur famille avant leur boulot et les hommes l'inverse, que les maris préfèrent trainer au bureau pour se mettre les pieds sous la table, que les petites filles aiment souvent les robes qui tournent et les babies rose, ce qui peut, oui, c'est vrai, parfois les détourner de la grosse baston du bac à sable (mais pas toujours)

Mais moi, je n'ai jamais ressenti ça.
Et j'en viens à me demander qu'est-ce qui ne va pas avec moi (je suis une femme, je cherche toujours en quoi je suis coupable) parce que plus de 20 ans après être entrée sur le marché du travail, je ne me suis jamais autant sentie à ma place.
Alors, oui c'est vrai, je n'ai jamais été une carriériste à tous crins, mais pas sortie d'une école qui tue, j'ai quand même fait mon chemin. C'est vrai qu'on ne m'a jamais promis amour, gloire et beauté professionnelle. Que j'ai toujours croisé des patrons plutôt ouverts à la cause des femmes (mais suis-je vraiment la seule ?) et que je n'ai jamais brandi ma maternité comme un coupe file, pas par féminisme non, mais parce que je le sentais comme ça et que ce choix de maternité c'était un affaire de couple et qu'il était inutile de convoquer le CoDir.

Mais je me dis que pour aborder cette question aux faux airs de serpent qui se mord la queue déguisé en Arlésienne, il faudrait peut-être envisager la question avec un oeil neuf

Et si on sortait la tête de la photocopieuse / machine à laver / cocotte / poubelle de couches / congélateur (vous avez remarqué comme les femmes passent leur vie à avoir la tête dans un truc ?) et qu'on demandait à plein de femmes de réfléchir à ça :

Par rapport à votre mari / vos collègues / les hommes de votre promo, pensez-vous être plus heureuse ou moins malheureuse au global ?

(au moins aussi heureuse, je dirais moi. Même si parfois j'ai l'impression de passer ma vie dans une essoreuse coincée sur 1200 tours, je n'échangerais pas ma vie contre un autre baril de lessive)

Par rapport à votre mari / vos collègues / les hommes de votre promo, à quel point pensez-vous que le fait d'être une femme soit un  handicap dans votre travail ? De 10 un gros handicap à 0 un handicap zéro, les notes intermédiaires servent à nuancer votre jugement

(mmmm, laissez-moi réfléchir. je dirais 0)

Parce que je voudrais qu'on sorte de cette opposition stérile entre hommes et femmes, parce que tout ne peut pas être partagé à parts égales et que c'est la somme des déséquilibres qui doit former un tout qui roule. Alors parfois ce sont les enfants qui gagnent et parfois c'est le boulot, parfois le mari, parfois sa femme, parfois on vit ces moments de grâce où tout roule et puis parfois ça se fissure.

Et que ouais une femme qui décide de sortir des clous (assumer son non désir d'enfants, vouloir diriger un groupe de 5000 personnes, avoir plus de 2 enfants, divorcer, se remarier), va devoir y aller avec les dents et une bonne dose de folie, qu'elle va devoir battre en brèche des préjugés et sortir son bazooka.

Mais je ne suis pas sûre que ce soit plus facile pour un homme, qui lui, doit afficher une réussite triomphante au risque de passer pour une lavette. (j'ai en mémoire le cas d'un homme à la profession très mâle qui a dû subir les risées et le vexations de ces collègues pour avoir osé prendre un congé parental de 6 mois)

C'est moins le sexe qui compte que le désir de sortir du chemin tracé, ne croyez-vous pas ?

Je vous embrasse






3 commentaires:

  1. Je trouve cet article super et vraiment constructif, ça fait plaisir à lire. Je pense que tu as aussi eu de la chance dans ta vie professionnelle, parce que, il faut quand même le dire, le sexisme existe dans de nombreuses boîtes. Mais par rapport au débat, je trouve qu'il est un peu fermé également. Toutes les femmes ne sortent pas d'HEC et ne se rêvent pas au comité de direction (même parmi celles qui sortent d'HEC d'ailleurs).
    Il faut bien sûr rappeler que lorsque l'on s'investit dans son job et que l'on produit de bons résultats, on devrait logiquement en obtenir de la reconnaissance, d'une manière ou d'une autre, sans avoir besoin de faire du lobbying pour que le patron le voit ou d'aller pousser un coup de gueule. C'est le rôle des managers d'être attentifs à la contribution de chaque membre de son équipe et d'en tenir compte. Ce système où les grandes gueules gagnent et les travailleurs discrets perdent, quel que soit leur sexe d'ailleurs, ne devrait pas exister.
    Mais il faut aussi souligner le fait qu'on peut avoir envie d'investir dans autre chose que sa carrière, que l'on ait des enfants ou pas. On peut avoir un bon cursus de formation, apprécier son job et bien l'assumer, et ne pas avoir les dents qui râclent le plancher. Et puis, comme tu le dis, lorsque l'on choisit d'être mère, on sait que ça a des conséquences. Si on n'est pas prêtes à lâcher du lest sur son boulot, c'est avec le père qu'il faut en discuter, pour qu'éventuellement ce soit lui qui s'occupe davantage des enfants. Cela ne regarde pas l'entreprise (même si le fait qu'une femme ait des enfants ne doit pas servir de prétexte pour lui barrer la route, si elle répond aux compétences demandées pour le poste qu'elle souhaite occuper).
    Et encore une fois,même si l'on n'a pas d'enfants, on peut ne pas vouloir faire certains sacrifices, en passant par exemple sa vie en déplacements, en acceptant des challenges d'objectifs commerciaux tels que l'on n'en dormira plus, en trouvant un autre équilibre en fait. Parce que le travail n'est pas tout, et que, comme tu le dis, ce qui nous épanouit peut être ailleurs.
    Encore merci pour ce billet :-)

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  2. Merci beaucoup pr ce billet éclairant!
    A lire aussi un article très intéressant sur la situation outre atlantique: http://www.theatlantic.com/magazine/archive/2012/07/why-women-still-cant-have-it-all/309020/6/
    (même si on ne travaille pas à un haut poste du gouvernement, on s'y retrouve un peu!)

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  3. Merci Marie, Merci Plume ! Ce sujet m'entraîne beaucoup plus loin que je ne pensais, c'est un genre de puit sans fond...

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